Naissance d’un écrivain

avril 25, 2025

Pendant longtemps, j’ai été en quête de sens.

Pourquoi étais-je né ? À quoi servait ma vie ? Que devais-je en faire ?

Mon esprit refusait d’abdiquer. Il se refusait à considérer l’existence comme un bref moment à passer sur Terre avant de disparaître dans le néant… ou un hypothétique paradis. Ce n’est que bien plus tard que je commençai à percevoir une forme de cohérence dans mon parcours. Un fil d’Ariane. Quelque chose qui m’amenait peu à peu vers le centre du labyrinthe — là où, peut-être, se cachent les réponses.

L’idée m’est venue alors : et si je racontais des histoires ?

Et si mes expériences passées devenaient la matière première de récits romancés ?

C’est à New York, en 2018, que cette idée s’est imposée.

Je venais de terminer une année universitaire et je m’étais brouillé avec un ami.

J’errais dans le petit studio que je louais, et un ennui profond, presque physique, m’enserrait le corps comme des cordes invisibles.
Je me disais : « Ce n’est pas possible. Être à New York et m’ennuyer ainsi… »

Alors je suis sorti courir. Depuis 2008, courir m’aide à réfléchir, à oxygéner mon corps et mon cerveau. À clarifier mes pensées. Puis j’ai marché longuement, tentant de trouver comment rendre ce séjour productif.

Durant les cours que je suivais à Queen’s College, nous avions souvent étudié les TED Talks. Ces conférences où des inconnus montent sur scène pour raconter le moment où leur vie a basculé.

Une intervenante m’avait particulièrement marqué.

Ancienne militante écologiste, elle racontait s’être sentie complètement perdue. Elle montra une photo d’elle à l’époque : mains sur les joues, assise dans un bateau, le regard vide.

Puis elle expliqua comment un simple livre, trouvé par hasard, l’avait aidée à y voir plus clair. Grâce à des exercices d’introspection, elle avait retrouvé sa voie. Et aujourd’hui, elle se tenait là, chef d’entreprise, influente et accomplie.
Ce témoignage m’avait bouleversé. J’avais commandé le livre immédiatement. Il n’existait qu’en anglais américain.

Malgré une année passée à améliorer mon anglais, le vocabulaire était si précis que je dus le lire lentement, mot après mot, traduisant parfois via mon téléphone.

Peu à peu, les exercices prirent sens. Et quelque chose se réactiva en moi : ce souvenir de la maîtresse parlant au directeur… et de mon goût pour l’écriture.

Je repensai à cette vieille réflexion que je m’étais faite un jour : « Il m’est si difficile de trouver un roman qui me plaît… peut-être devrais-je en écrire un moi-même. »

Je me mis donc en quête d’un lieu où le faire. Plusieurs tentatives échouèrent. Puis, un jour, je découvris la New York Public Library.

Tom Wolfe venait de mourir. Il avait fait don de ses manuscrits à cette institution.

Il disait, en substance : « J’ai tellement passé de temps à écrire mes romans dans cette bibliothèque, que je considère comme une juste rétribution que de lui offrir ce que ses muses m’ont inspiré. »

Et c’est là, dans ce lieu solennel, avec ses grandes fenêtres et ses rangées de livres anciens, qu’un nouveau chapitre de ma vie a commencé.